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Vignettes mémorielles

Wagner, de Venise à Paris

22 Février 2017 , Rédigé par Jean-Pierre Maillard Publié dans #Actualité, #Musique, #Beaux-Arts

Wagner, il y a les pour et les contre, qui ne sont d'ailleurs pas toujours ceux qu'on croit. Depuis ma première rencontre avec Tristan, (prochaine étape : Lyon en mars, selon la mise en scène qu'avait faite Heiner Müller à Bayreuth ), je suis toujours du premier bord. Je crois que c'est fondamentalement parce que l'opéra de Wagner c'est le comble, sans doute indépassable, de la possibilité de l'art total que constitue le genre de l'opéra, intégrant toutes les formes artistiques possibles, y compris les plus modernes, comme par exemple la vidéo. Ayant récemment assisté, dans des conditions très différentes, à deux représentations d'opéras antérieurs à la Tétralogie (qui est pour moi la tentative la plus aboutie et presque la réussite absolue), Tannhaüser dans la version de Dresden à ...Venise et Lohengrin à Bastille, je peux dire que c'est toujours un régal mais pour que le bonheur soit complet il faut que l'orchestre, les chanteurs et la mise en scène soient à la hauteur. Ce qui est beaucoup demander.
Assister en janvier à une représentation de Wagner à
la Fenice était sans doute une sorte de provocation. Car si Wagner est mort à Venise (C'était un peu la mode !) et a même fini par y avoir un certain succès, on attendait plutôt La Traviata ou Rossini. Le jeune chef (Omer Meir Wellber), l'orchestre et le choeur (italiens) étaient bons et le public (beaucoup de visons en cette saison !) réceptif. Celui-ci n'en a pas moins contesté à juste titre la mise en scène, pourtant pas vraiment moderne malgré quelques violences gratuites et certaines poses de Vénus un peu osées au regard de la morale italienne, y compris au dernier acte (car au premier cela va de soi), mais c'est vrai que la mort d'Elisabeth et donc de Tannhaüser est bien artificielle et « inférieure » à celle d'Yseult, qui n'allait pas tarder à suivre dans la chronologie des créations wagnériennes.
La mise en scène de
Lohengrin à Paris (sans cygne quand même, Leb wohl, mein lieber Schwan !) n'avait rien non plus de très moderne. Malgré le parti pris de situer l'action au dix-neuvième siècle, choeur en hauts-de-forme, décor en balustrades genre phalanstère donnant sur une cour arrosée (faute d''Escaut), soldats pointant de leur fusil le fugitif, et même un piano omniprésent auquel je n'ai rien compris, on est très loin de l'extraordinaire Anneau de Chéreau-Boulez à Bayreuth d'il y a (déjà) quarante ans, qui avait inauguré cette relecture moderne et qu'il faut revoir en video. Mais Jordan, l'orchestre et le choeur de l'Opéra de Paris étaient excellents, Lohengrin et Elsa très corrects, en l'absence prévisible (nous ne faisons pas partie des abonnés de l'Opéra !) de Martina Serafin et de Jonas Kaufmann. Cela étant, le côté lourdaud de Stuart Skelton était sans doute plus dans la vision très spéciale du metteur en scène, d'un Lohengrin plus paumé que solitaire, encore moins ange déchu. Michaela Schuster en Ortrud fut à juste titre très applaudie dans ce rôle très wagnérien, et j'espère qu'elle jouera la Kundry de Parsifal l'année prochaine (ouverture de la billeterie pour les non abonnés le 21 novembre ! )
Au final ni
Lohengrin ni Tannhaüser n'ont ma préférence. Avec Le Vaisseau fantôme et Les Maitres chanteurs on est encore dans l'opéra romantique, il y a même des arias qu'on pourrait trouver dans Verdi. Mais ce qui est intéressant dans ces deux œuvres d'avant la maturité c'est qu'on peut déjà pressentir, tant du point de vue musical (là c'est déjà génial) que du texte et de la dramaturgie, ce qui donnera Parsifal en passant par la Tétralogie après Tristan. In fernem Land c'est déjà Kurvenal/Tristan, Siegfried mais aussi Parsifal. Seule façon d'ailleurs de comprendre des histoire un peu compliquées. Car les deuxièmes actes chez Wagner sont toujours un peu longs et tout ne passe pas toujours par le texte (Pour Lohengrin, je recommande tout simplement la lumineuse présentation de Liszt). De plus son mysticisme « laïque », d'inspiration très chrétienne et germanique s'entend, d'où d'ailleurs la récupération qui en sera faite, reste fondamentalement ambigu et donc pas facile à déchiffrer.

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